Conseils,  shiatsu

Une « bonne pression » en Shiatsu…

Je suis praticienne Shiatsu depuis 20 ans, formatrice depuis 15 ans, et ma joie au quotidien, dans mon travail, c’est de trouver la pression juste, adaptée, correcte.

Bien sûr, ce sont des recommandations que tous les stagiaires entendent, encore et encore, tout au long de leur formation, et aussi lors de chaque stage complémentaire, hors cursus.

En réalité, en général il faut bien 3 ou 4 ans pour SENTIR toutes les qualités techniques d’une pression ajustée :
  • Stable : pas de recherche intempestive du pouce, d’hésitations, pas de « pompages » pour rechercher la bonne profondeur… Elle doit se trouver immédiatement, spontanément, sous peine de changer de paradigme pour la personne qui reçoit. C’est-à-dire que d’un bien être confortable, elle passe à une sensation cutanée qui la ramène au monde du massage, de la surface, du contact corporel. Dommage, la replongée dans le monde du Shiatsu se fera en pointillée, et on sait combien les qualités d’abandon ne sont pas si facilement accessibles !
  • Centrée : eh oui ! ça me rappelle une anecdote : dans mon jeune temps de professeure, je ne cessais de rappeler à mes stagiaires que le mouvement doit jaillir du Hara, du Centre. Respirer avec le Hara. Comprendre les interactions Yin Yang des Jushas – receveurs –  à partir du Hara, de sa totalité. Laisser de côté l’égo pour laisser toute la place au Hara, au Centre, au Shen. Sauf que… une stagiaire a osé m’interrompre dans mes litanies sacralisées pour me signifier qu’elle n’y comprenait rien ! C’est quoi, le Hara, concrètement, dans le corps ou dans l’état d’esprit ?

J’espère, chère lectrice, cher lecteur, que tu as une idée « incorporée » de cette notion fondamentale, car c’est bien l’objet d’une ou plusieurs années d’enseignement du Shiatsu, cependant je peux dire ici que « Centrée », c’est une pression où on met tout notre cœur, notre écoute, notre effort de compréhension du système de l’autre, sans force, sans volonté, à partir du bassin, de nos appuis au sol, à partir de notre unité qui rejoint celle de l’autre par nos contacts sur le corps de l’autre.

Contact souple et alerte. Il faut du temps pour intégrer que ce n’est pas paradoxal !
  • Équilibrée : oui, chez Masunaga c’est certain, l’écoute du trajet énergétique du méridien ne peut se faire qu’avec 2 contacts sur le trajet. Un pouce yin et l’autre yang, en mouvement, qui sont interchangeables, bien sûr.

Mais si on a, malencontreusement, un gramme de pression supplémentaire à droite au détriment de la gauche (ce n’est pas une réflexion politique, s’entend !!), parce qu’on a la flemme de placer son centre exactement au milieu et au-dessus de la zone traitée, alors nos pressions deviennent, encore une fois, un massage, une technique qui s’adresse uniquement au corporel. Le centre est manqué. Autrement dit, l’écoute de qualité énergétique est impossible, et mon Shen ne peut pas rencontrer le Shen de mon Jusha.

Dommage !

  • Progressive. Eh oui ! Si je plonge tête baissée sur mon tsubo – le point d’acupuncture que j’atteins avec les pouces -, ce délicat bouton de fleur refusera de s’ouvrir et d’offrir tous ses parfums. Encore une occasion loupée de rencontrer l’autre. Quelle perte de temps et d’énergie, car c’est bien ce qui rend le Shiatsu tellement unique et précieux ! Donc entrer en contact, délicatement, comme si on demandait la permission d’entrer, dans la bonne tradition japonaise, avec courbettes et excuses, puis se VOIR, se reconnaitre, s’apprivoiser, sans un mot, presque sans un regard, avec pudeur authenticité, et se quitter comme à regret, prendre le temps de l’aurevoir, se dire encore des choses essentielles sur le pas de la porte, toujours avec noblesse et délicatesse…

Alors OUI ! Voilà pourquoi je fais du Shiatsu depuis 20 ans, je remercie chaque être humain de me permettre de le rencontrer de cette façon, sans les salamalecs sociaux, ceux qui, convenus dans le quotidien, me mettent un peu mal à l’aise, me mettent en retrait, je ne sais pas faire, moi, les petites conversations qui placent les bonnes distances, qui ne disent pas grand-chose mais qui autorisent une cordialité de surface…

Je n’ai pas voulu être psy justement pour ça. Ne pas utiliser les expressions quotidiennes pour aborder l’intime.

Intime dont j’ai tant besoin dans ma vie pour me sentir entière, vivante. Si je ne te rejoins pas, ma vie ne sert à rien. Si je ne me sens pas touchée, entendue et comprise, non plus.

Ce besoin vital de « fusionner », sans dépendance affective ni sentiment amoureux tortueux, le Shiatsu me l’offre. Dans l’exploration de cet espace incroyable, ce monde intergalactique qui surgit entre mes 2 pouces, entre le mollet et le creux poplité !

Le jaillissement de cet état, plein de Ki, impossible à reproduire à l’identique, impossible même à convoquer, ne se laisse découvrir que si les 4 principes d’une bonne pression de Shiatsu co-animent la pratique.

Enfin deux inconscients peuvent dialoguer, enfin je ne sais pas nommer autrement cette rencontre unique entre deux êtres vivants qui s’ouvrent et se comprennent parfaitement.

Une osmose à partir de laquelle on ne se sent plus seul, on se sent rejoint, intiment touché, un contact qui s’ouvre sur une détente et une absolue confiance, qui permet ENFIN d’être vu.

Si je suis vue, alors je peux aussi me regarder. Si je me vois, je me connais, je me rencontre, si intiment, et bien autrement que chez la psy ou que sur l’oreiller avec son grand amour. Ce n’est pas mieux, c’est complètement différent.

C’est étonnant de réaliser que ce contact si proche – allez, oui ? on a parfois la cuisse ou la tête de l’autre bien proche de notre regard, sans parler d’Estomac 17 ou 30, n’est-ce pas ? – provoque une plongée intérieure ouverte sur un presqu’infini ! Je ne sais pas vous, mais quand je reçois un bon Shiatsu, j’ai des souvenirs improbables qui remontent du fond des âges, ou j’ai des images si insolites que j’oublie qui je suis, quelles sont les limites de mon corps, je perds la notion du temps, de mon identité… C’est délicieux !

Et quand je sais que, concrètement, en même temps ma rate se régénère et que mon système émotionnel se régule, je jubile ! Quelle expérience !

Dans ce texte, je mêle les vécus du Shiatsushi et celui du Jusha, mais c’est un peu pareil, non ? Cette fusion nippone réunit les êtres, et je sais que « quand je travaille sur toi, je travaille sur moi » ! L’écho des méridiens se répond indifféremment chez toi ou chez moi !

Sophie Alet – centre de formation Anatsu

Responsable pédagogique

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